LYDIA TABARY                                                                                                                                       TEXTES ASSOCIES A DES OEUVRES

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 La Carnassière - 1992 - EnsemblageENSEM_ASSEM_COLL_1990_-_99.html

Quelques mots sur La Carnassière



Ce travail traite de la mort subie et de la rage impuissante qu’elle provoque : cadavres en décomposition, hommes et bêtes conviés à la même agonie (famine, guerre, abattoir, équarrissage). Il traite aussi de l’insupportable obscurantisme du monde actuel où les religions perdurent, prétextes à maints conflits inutiles…(la croix centrale est une planche à découper de boucher, en téflon, et les traces qu’elle porte sont les sillons creusés par le hachoir, colorés par la chair et le sang de centaines de bêtes).


Il a été conçu comme un « ensemblage » c’est-à-dire la juxtaposition finalisée d’éléments autonomes plus ou moins disparates appelés à cohabiter pour produire du sens tant sur le plan formel que sur le plan thématique, ce que le titre de d’œuvre « la carnassière », exprime et précise en se posant comme signe.

Le mot « carnassière » recouvre deux acceptations :

-Nom féminin, il désigne un sac (servant au chasseur pour porter le gibier) donc un contenant : un objet qui reçoit, contient, enferme et véhicule une ou plusieurs pièces qu’il tient ensemble et englobe.

-Adjectif (masculin ou féminin), il qualifie celui ou celle qui se nourrit de viande, de chair crue : carne (chair) – carnage (massacre, tuerie, boucherie, hécatombe).


Transposés sur le plan de la représentation visible, le premier sens (nom féminin) correspond au signifiant du travail, tandis que le second renvoie au signifié, l’ensemble étant et faisant signe.


Les divers matériaux et objets employés ont en commun d’être, soit par nature, soit par leur référent réel, dans une relation étroite avec la racine du mot carnassière « carne » (chair), c’est-à-dire avec le signifié.

En revanche, leur traitement plastique qui fait intervenir différents matériaux, procédés et techniques (sculpture, peinture, photographie, ready-made, collage, assemblage, montage…), réalise un « ensemblage » qui renvoie au signifiant.


La valeur des divers éléments est plutôt instrumentale et joue à la manière d’un révélateur : ils organisent, définissent les unités significatives de l’œuvre et les mettent en relation afin de dégager une structure générale, d’ « ensembler » tous les matériaux pour les faire exister non pas en tant que tels mais dans l’exploration qu’ils appellent, avec ses aléas.


Ici, les éléments ne sont pas imbriqués et ne se confondent pas dans un assemblage visant à l’unité, ils sont mis à plat et orientent une lecture qui procède par associations d’idées, entraînant le regardeur dans une démarche réceptive active, identique ou très proche de la démarche productive de l’artiste.


1992 - Lydia Tabary

La Carnassière, 1992